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POUR UNE REPLIQUE DE LA GROTTE COSQUER A MARSEILLE

Rarement l’argent de la collectivité n’est aussi bien dépensé que lorsqu’il est mis au service du bien commun, dont le patrimoine et la culture font partie intégrante. Dans le cas de la préhistoire, cette priorité accordée à la culture se double d’une leçon héritée de notre passé commun : les grottes ornées préhistoriques, œuvres universelles et profondément humaines, ont été investies et décorées par des chasseurs-cueilleurs nomades, parvenus en Europe occidentale au terme de longues et périlleuses migrations depuis l’Afrique, l’Orient et l’Europe de l’est. Leur parcours et leur destinée résonnent ainsi de manière aiguë avec l’actualité sociale et politique internationale.

Animés de cette conviction, les progressistes doivent mettre à l’ordre du jour, parmi tant d’autres dossiers et combats urgents, la réalisation à Marseille d’un fac-similé de qualité de la grotte Cosquer, dans le cadre d’un projet culturel et scientifique plus ambitieux lié à la mer, poumon économique et écologique de la cité phocéenne.

Signalée aux autorités en 1991 par le plongeur Henri Cosquer, quelques années après sa découverte, la grotte Cosquer est située sous le niveau actuel de la mer, à proximité du cap Morgiou en plein cœur du parc national des calanques. Elle a été occupée et ornée, pour des raisons cultuelles ou religieuses, par des tribus de chasseurs-cueilleurs de la période paléolithique (âge de pierre durant l’époque glaciaire), qui y ont représenté il y a 27 000 ans (période gravettienne) et 19 000 ans (période solutréenne) des dizaines de figures animales, dont des mammifères marins qui en font un cas unique dans l’art pariétal européen.

Face à la richesse et à la qualité des représentations pariétales, menacées par la lente et inexorable montée du niveau de l’eau dans la cavité en lien avec le réchauffement du climat, on ne peut que regretter qu’aucun fac-similé digne de ce nom ne permette la mise en partage, près de 30 ans après sa découverte, de ce patrimoine commun de tous les marseillais, et au-delà, de l’humanité tout entière. Une réplique partielle, présentée au Centre Bourse il y a plusieurs années, a même été détruite, victime de l’inattention et la légèreté des services municipaux! Il est temps de réparer cette injustice faite à ceux qui inventèrent, il y a des millénaires, les premières cultures constituées à l’échelon européen, posant les bases de la civilisation humaine. En fabriquant pour cela à Marseille, comme cela a été fait en Ardèche pour la grotte Chauvet-Pont d’Arc et en Dordogne pour Lascaux, un équipement public et culturel de qualité au service du partage de l’art des origines, et des savoirs techniques et artistiques extraordinaires de nos ancêtres, Homo sapiens comme nous et descendants de migrants partis d’Afrique, berceau de notre humanité.

Pedro Lima – Journaliste scientifique

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